C’est avec une aisance déconcertante que Marie devient mère à 43 et 46 ans…
Aux antipodes du cliché de la quinqua « hasbeen », elle nous raconte son parcours et son quotidien avec ses deux enfants de 6 et 9 ans. Comment tire-t-elle profit de la maturité ? Se pose-t-elle des questions par rapport à son âge ? Quelle éducation donne-t-elle à ses enfants ? Comment vit-elle cette maternité tardive ?
Voici l’interview sans filtre d’une mère tardive et épanouie
Marie, as-tu toujours voulu avoir des enfants ?
Jusqu’à 30 ans, non ! J’avais une approche plutôt intellectuelle des choses. Je trouvais que le monde n’était pas suffisamment accueillant et l’avenir plutôt sombre. Je ne voyais pas l’intérêt de faire des enfants dans ce contexte.
J’étais préoccupée par la surpopulation et tous ces enfants qui attendaient dans les centres d’adoption…
Puis, j’ai rencontré quelqu’un autour de 34 ans, qui m’a permis de me projeter en famille, mais l’histoire n’a pas fonctionné… Quelques années plus tard, je rencontre mon compagnon actuel, mais il n’est pas dans l’optique de faire un bébé. Il m’a fallu plusieurs années pour le convaincre, avec un désir d’enfant chevillé au corps ! J’étais partagée car j’étais prête à le quitter et en même temps j’avais vraiment le sentiment que c’était ma dernière chance de devenir mère…
Es-tu tombée enceinte facilement ?
Oui, plutôt rapidement ! En revanche, j’ai fait une fausse couche pour mon fils à 43 ans et deux fausses couches avant ma fille à 46 ans… Mon gynéco me disait que j’avais une grande fertilité ;-).
J’ai eu des grossesses incroyables, sans aucun désagrément.
J’étais vraiment très en forme. Et si j’avais commencé plus tôt, j’aurais sans doute fait 6 ou 7 enfants ;-). Bien sûr, j’ai eu un suivi très rigoureux, avec prises de sang et échographies…
Mais mon premier accouchement a été un peu rock’n roll : j’ai fait un faux travail qui a duré 4 jours. Les suites de couche ont été dures aussi. Je me suis assise sur une bouée pendant un mois, suite aux forceps et à l’épisiotomie et j’ai eu du mal à récupérer l’autonomie de ma vessie !
Comment as-tu géré la fatigue de cette maternité tardive ?
Parfaitement bien… j’étais tellement heureuse de devenir ENFIN maman !
Pourtant mon fils n’a pas fait ses nuits avant plusieurs mois, il avait des problèmes d’œsophage et de coliques du nourrisson… Mais avec mon compagnon, nous flottions sur un petit nuage et on se fichait de ne pas dormir.
Étrangement, je ne me suis jamais sentie fatiguée, même en accueillant mon deuxième enfant à 46 ans…
Et puis, je n’ai jamais réfléchi en termes d’âge, je me disais que deux jeunes enfants, c’était prenant, ça demandait de l’énergie et que tout cela était normal !
Justement, comment vis-tu ton âge ?
Mon âge ne me pose problème QUE dans le regard des autres !
J’ai écopé de quelques réflexions maladroites quand mes enfants étaient petits. Enceinte à 46 ans, j’ai eu droit à « Ah bravo, à votre âge, pas facile d’être enceinte ! ». A la campagne, on nous demandait si notre fils était notre petit fils… A chaque fois, j’étais hyper surprise et je mettais la réflexion sur le compte d’autre chose (la fatigue, le fait que mon mari ne soit pas rasé…) , comme si j’essayais de nier un peu la réalité ;-).
Honnêtement, c’est assez désagréable à vivre, d’autant que je n’ai pas la sensation d’avoir mon âge… Je côtoie beaucoup de mamans plus jeunes, mes copines ont plutôt 15 ans de moins que moi et j’ai un quotidien très actif.
Je m’identifie plus à une femme de 45 ans qu’à une femme de 53 ans. D’une certaine façon, je vis une cure de jouvence.
Aujourd’hui, avec des enfants de 6 et 9 ans, j’ai beaucoup moins de réflexions. Ce qui trouble les gens, c’est de voir un nourrisson avec une femme plus âgée.
As-tu parfois le sentiment de vivre en décalé ?
Oui, bien sûr ! Je suis plus dans des codes et des façons de vivre de ma jeunesse (les années 80). J’ai gardé mes CD et Je ne manie pas vraiment bien les réseaux sociaux par exemple !
Je sais que je vais devoir faire des efforts pour rester à la page dans certains domaines… Le fossé générationnel est plus important avec mes enfants. Et je ne souhaite pas qu’ils nous renvoient encore plus l’image de « vieux cons » à l’adolescence.
Je continue à beaucoup me documenter et à assister à des conférences sur la parentalité et l’adolescence par exemple !
Parfois les grands évènements de la vie aussi me rappellent mon âge ! J’ai dû m’occuper de mes parents âgés et malades alors que mes enfants étaient encore très jeunes et peu autonomes… Et je n’ai pas vraiment bénéficié de leur aide à la naissance de mes enfants, même si ma mère était venue me prêter main forte à la maison. Mais je n’ai jamais pu leur laisser mes deux enfants pour un WE par exemple. Ils étaient déjà âgés et fatigués.
Le décalage se vit aussi dans les relations avec les autres parents. Il est vrai qu’avec 15 ans d’écart, on n’a pas toujours les mêmes goûts, centres d’intérêt ou préoccupations. Il y a moins d’évidence dans la relation amicale…
Te poses-tu des questions par rapport à l’avenir ? Te projettes-tu dans 10 ans ?
Même si je ne suis pas obsédée par mon âge, je me pose quand même des questions par rapport à l’avenir.
Mon mari et moi avons conscience de ne pas être des jeunes parents. Et bien sûr, il nous arrive de faire des calculs un peu anxiogènes…
Se dire qu’au moment où nos enfants vont rentrer dans la vie active, nous l’aurons probablement quittée, c’est un peu dur…
Mais nous vivons aussi l’instant présent, sans trop nous projeter, et nous essayons de leur transmettre le goût du travail et une certaine autonomie.
Comment éduques-tu tes enfants ? Penses-tu que la maturité influe sur tes choix éducatifs ?
Je ne suis pas certaine que l’âge joue vraiment sur la façon dont j’éduque mes enfants. A 35 ans, j’aurais sans doute fait la même chose.
Ma façon d’accompagner mes enfants est juste une conséquence de ma personnalité et de mon intérêt pour la pédagogie et l’éducation en générale. Je suis éditrice, donc je lis beaucoup, et j’ai eu accès à des ouvrages passionnants sur différentes méthodes éducatives.
Je suis plutôt une maman zen, pas très autoritaire, à l’écoute de ses enfants et protectrice. Ce que je souhaite leur transmettre avant tout c’est la confiance en soi, l’optimisme et l’empathie.
Aurais-tu aimé faire tes enfants plus tôt ?
Oui sans doute, quand j’ai commencé à en avoir envie, vers 34 ans…
Et en même temps, je me dis que cette maternité tardive avait ses avantages : j’ai eu le temps de faire plein de choses avant de devenir maman (voyager, aller au théâtre, m’investir dans ma carrière professionnelle… ). Je ne me suis jamais sentie frustrée à l’arrivée de mes enfants et c’est un vrai plus !
En revanche, j’attends la prochaine décennie avec impatience : mes enfants seront autonomes et je pourrais recommencer à voyager et à sortir le soir sans prendre de baby-sitter ;-).
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