Vous avez sans doute entendu parler du don de gamètes comme solution aux troubles de la fertilité.
Don d’ovocytes, double don, don d’embryons… Sous ces termes un peu barbares se cachent différents besoins, différents protocoles, différentes façons de devenir parent(s) aussi.
Pour en parler, j’ai posé des questions à Jennifer Rayward, co-fondatrice de la clinique Procreatec à Madrid. Au sein de son établissement, elle accompagne quotidiennement des hommes et des femmes en couple ou en solo, désireux de devenir parents sur le tard.
A qui s’adresse le don d’ovocytes et dans quel cas est-il intéressant d’y avoir recours ?
Le don d’ovocytes s’adresse aux femmes dont la réserve ovarienne est épuisée, (âge, ménopause précoce…), qui sont victimes de malformations génétiques ou qui ont subi un traitement agressif (chimiothérapie, radiothérapie, etc.).
Pour bénéficier d’un don d’ovocytes, elles doivent avoir compris qu’elles ne pourraient pas tomber enceinte avec leurs propres ovocytes. Il faut qu’elles soient prêtes psychologiquement et qu’elles aient fait le deuil de leur capital génétique. Cela peut prendre un peu de temps.
Le don d’ovocyte est un protocole beaucoup plus simple qu’il n’y parait.
- On commence par faire des examens de santé à la femme qui reçoit l’ovocyte pour s’assurer qu’elle peut vivre une grossesse,
- puis on choisit la donneuse, au sein d’une banque de données, selon le principe de l’appariement (yeux, couleur de peau, taille plus ou moins similaire à la receveuse),
- on prépare ensuite l’endomètre de la receveuse, grâce à une stimulation ovarienne,
- les ovocytes de la donneuses sont ponctionnés et le sperme du compagnon est récolté
- S’ensuit la phase de préparation des embryons
- 5 jours plus tard, les embryons sont transférés à la receveuse
On me demande souvent si la femme qui porte l’embryon d’une autre peut espérer transmettre quelque chose à son enfant et la réponse est OUI ! Il y a effectivement des interactions entre le placenta et l’embryon lors de la grossesse. Certains gènes de l’embryon s’activent et d’autres se désactivent. C’est ce qu’on appelle l’épigénétique. Certaines études mènent d’ailleurs à penser qu’un même embryon transféré à deux personnes différentes donnerait deux bébés différents !
Et puis, au delà de ça, la future maman va peut-être allaiter cet enfant, l’éduquer, lui transmettre des mimiques, une façon de parler etc… L’enfant ressemble parfois de façon troublante à la maman, sans être issu de son ovocyte !
Les chances de réussite d’un don d’ovocytes sont bonnes et s’élèvent à 65 à 70%.
Vous pratiquez également le double don. En quoi diffère-t-il du don d’ovocytes ? Ses chances de grossesse sont-elles plus importantes ?
Le protocole est sensiblement le même que pour le don d’ovocyte, on ajoute simplement le don de sperme. La différence se fait surtout au niveau logistique car la patiente n’aura pas besoin de venir pour la ponction de la donneuse. Elle ne viendra qu’un ou deux jours sur place pour le transfert.
Opter pour le double don, c’est faire le deuil complet de son capital génétique. Mais la plupart des femmes candidates à un double don sont des femmes célibataires en insuffisance ovarienne, et le don de sperme est une évidence pour elles. Elles ont déjà fait le deuil de leurs ovocytes, le double don est donc mieux accepté que pour un couple par exemple.
Les chances de réussite d’un double don (70-75%) sont plus importantes que pour un don d’ovocytes, car les deux gamètes sont jeunes et donc de très bonne qualité.
Enfin, vous proposez aussi le don d’embryon. En quoi est-il une alternative intéressante au double don ?
Certains couples, qui sont passés par un parcours de PMA, acceptent de donner leurs embryons surnuméraires à d’autres couples ou femmes célibataires. Ces embryons sont en général issus d’un double don. En effet, les couples utilisant leurs propres gamètes ont plus de mal à faire don de leurs embryons.
Les personnes qui font appel au don d’embryon le font pour plusieurs raisons :
- le traitement est plus léger. Il faut juste préparer la patiente à recevoir l’embryon.
- le coût est moins élevé (2 500 euros en moyenne), car l’embryon est déjà constitué, il faut juste le dévitrifier.
- Enfin, la démarche n’est pas tout a fait la même. Adopter un embryon, c’est presque adopter un enfant, avec tout ce que cela implique de surprises et d’incertitudes. Les patients qui bénéficient d’un don d’embryon sont d’ailleurs moins attachés aux caractéristiques physiques puisqu’à ce stade, ils ne peuvent plus choisir la couleur des yeux par exemple…
Le problème c’est qu’il y a beaucoup d’attente pour un don d’embryon. Cette attente est d’autant plus longue qu’une récente loi espagnole impose de nouveaux tests génétiques sur ces embryons. Ce qui implique de demander aux couples donneurs de faire des tests approfondis… Tout le monde n’est pas prêt à faire cela ! Nous avons donc des embryons en stock, qui ne sont plus utilisables car pas assez testés génétiquement.
Les chances de réussite du don d’embryon sont moindres (50%), car ce ne sont pas les « meilleurs embryons ». C’est un second choix, en quelque sorte.
En résumé, je dirais que le don d’embryon n’est plus vraiment une option aujourd’hui, car il y a trop de données inconnues et j’en suis désolée. Mais quand les tests génétiques vont se systématiser, ce sera à nouveau une alternative intéressante et les chances de réussite seront plus importantes. Il faut encore un peu patienter !
Chances de grossesse | Coût | |
Don d’ovocytes | 65-70% | 7 500 à 8 000 euros |
Double don | 70-75% | 8 500 euros |
Don d’embryon | 50% | 2 500 euros |
Si vous avez aimé notre article sur les dons de gamètes, vous aimerez sans doute le récit de Claire, du don d’embryon au désir d’enfant